La consommation de chocolat peut avoir un effet bénéfique cardiovasculaire, mais les preuves provenant de cohortes prospectives sont encore limitées.
Cette étude prospective japonaise a inclus 84.597 participants (38.182 hommes et 46.415 femmes) dans une tranche d’âge entre 44 et 76 ans, non diabétiques, sans antécédents cardiovasculaires ou néoplasiques à l’inclusion, entre 1995 et 1998. C’est la plus grande étude prospective réalisée à ce jour à la recherche d’associations entre la consommation de chocolat et le risque d'AVC chez les hommes et les femmes. Ces participants ont été suivis jusqu’en 2010 (suivi médian de 12.9 ans). Les données sur la consommation de chocolat pour chaque participant ont été obtenues à partir d’un questionnaire auto-administré sur la fréquence de la consommation de l’aliment.
Résultats : après ajustement pour l’âge, l’indice de masse corporelle, les facteurs associés au mode de vie, les apports nutritionnels et d’autres facteurs de risque, la consommation de chocolat était associée à un risque d’accident vasculaire cérébral (AVC) moins élevé chez les femmes (HR=0.84 ; IC à 95% 0.71-0.99). Cependant, l'association chez les hommes n'était pas significative (HR =0,94 ; IC à 95%, 0,80-1,10).
Les résultats de cette grande cohorte japonaise rapportent une association inversée significative entre la consommation de chocolat et le risque d’AVC chez les femmes mais pas chez les hommes. Cependant, les facteurs de confusion résiduels ne peuvent pas être exclus comme une explication alternative des résultats.
Cette étude est remarquable par son effectif et sa durée. L’enthousiasme qu’elle suscite doit cependant être tempéré par plusieurs éléments fondamentaux.
D’abord, le type de chocolat consommé n’est pas précisé et la quantité est faible. On estime que le chocolat au lait et le chocolat noir n’ont pas les mêmes propriétés nutritionnelles, celui-ci étant moins sucré et plus riche en antioxydants (entre autres). D’autre part, le phénotype et le génotype des individus de cette cohorte partagent peu de caractéristiques avec le caucasien, même si des études en Europe et aux Etats-Unis ont donné des effets assez proches, pas toujours significatifs (mais il existe une tendance bénéfique indiscutable). Le problème CV prévalent au Japon est l’HTA et le risque corollaire d’AVC ; l’IMC y est faible… L’alimentation est très différente, avec une forte consommation de poisson cru… Cela incite à une grande prudence et au moins à analyser plus soigneusement les caractéristiques de la cohorte. Quant à la transposabilité dans des populations de type européen, elle est très discutable.
Cela doit cependant faire réfléchir à une aussi belle étude dans nos contrées, à supposer qu’elle soit possible. Si toutefois elle est lancée, et indépendamment de l’industrie agro-alimentaire, il faudra au moins que les groupes soient bien définis, par exemple certains devront consommer au moins 100 g/semaine (une tablette normale), bien préciser le type de chocolat (on suggère du chocolat noir avec au moins 70% de cacao), préciser les risques cardiovasculaires présents à l’inclusion, les médicaments associés facteurs de confusion (statines…).
En attendant, il semble logique de ne pas se précipiter sans réserve sur le chocolat : sa teneur en sucre, graisses et calories n’est pas adaptée à tous - mais sans le diaboliser pour autant !
Référence : Dong JY, Iso H, Yamagishi K, Sawada N, Tsugane S; Japan Public Health Center–based Prospective Study Group.. Chocolate consumption and risk of stroke among men and women: A large population-based, prospective cohort study. Atherosclerosis. 2017 May; 260:8-12. doi: 10.1016/j.atherosclerosis.2017.03.p