Le polyéthylène hautement réticulé (CLPE) a été développé pour résoudre le problème de l’usure et de l’ostéolyse associé aux débris d’usure du polyéthylène de haut poids moléculaire (HPMPE). L’objectif de cette étude était de comparer les taux d’usure in vivo et les résultats cliniques et radiologiques entre le CLPE et le HPMPE dans une étude prospective randomisée en double aveugle, avec un minimum de suivi de 10 ans.
122 patients randomisés ont reçu soit un insert HPMPE conventionnel soit un insert CLPE. Le suivi clinique et radiographique sur un minimum de 10 ans a été effectué chez 91 patients. Les scores « Oxford Hip score » et « Short Form-12 Health Survey score” ont été mesurés. Les radiographies ont permis d’analyser l’ostéolyse et l’usure grâce à un logiciel permettant une analyse en 2D, 3D et volumétrique.
Les 122 patients ont été suivis pendant 10 ans. Pendant cet intervalle, 12 patients ont subi une chirurgie de révision, 21 patients sont décédés (dont 1 ayant subi une chirurgie de révision), et 2 patients ont été perdus de vue, soit un total de 91 patients pour l’évaluation clinique et radiographique. Au bout de 10 ans, les taux d’usure en 3D étaient significativement plus faibles (p<0.001) dans le groupe CLPE. La prévalence de l’ostéolyse était également significativement plus faible (p<0,005) dans le groupe CLPE, tout comme le taux de révision. Aucune différence significative n’a été trouvée entre les deux groupes pour les scores cliniques.
Les inserts CLPE ont significativement réduit les taux d’usure et sont associés à un taux plus important de survie de l’implant à 10 ans comparativement aux inserts HPMPE conventionnels.
Commentaire :
L’usure du couple de friction est l’une des complications les plus fréquentes, responsable de l’échec à long terme des arthroplasties de hanche. Cela a conduit à utiliser des couples dur-dur de type céramique qui peuvent poser le problème de fractures d’insert ou de type métal avec le risque de réactions inflammatoires ou relargage d’ions métalliques(1).
L’utilisation du procédé de stérilisation au rayonnement gamma du polyéthylène de haut poids moléculaire (HPMPE) a permis d’obtenir un polyéthylène crosslink hautement réticulé (CLPE), pour lequel la diminution de l’usure à 10 ans a été démontrée mais sans répercussion sur les résultats cliniques et radiographiques (1,2).
L’étude présente est donc intéressante car c’est la première étude randomisée en double aveugle évaluant l’usure du polyéthylène utilisant une formule de modélisation de la pénétration de la tête fémorale, et liant les résultats d’usure aux résultats de survie des implants, de qualité de vie des patients et d’ostéolyse radiographique. Une série de 91 patients a pu être évaluée au recul minimum de 10 ans après prothèse totale de hanche utilisant une cupule non cimentée, une tête fémorale métallique de 26 mm et une tige cimentée, l’insert en polyéthylène étant soit HPMPE, soit CLPE. Le taux d’usure à 10 ans était significativement plus bas pour le crosslink, de même que le taux d’ostéolyse radiographique et le taux de révision prothétique, alors qu’une précédente étude randomisée n’avait pu établir de différence de taux de descellement aseptique à 10 ans (3). Il n’y avait pas de différence concernant les scores cliniques et de qualité de vie, comme cela avait déjà été rapporté (4).
Si une autre étude randomisée à 10 ans de recul évaluant le même polyéthylène crosslink que celui de la présente étude avait déjà montré des taux d’usure plus bas (5), c’est la première fois que des mesures multiples dans le temps sur la même hanche sont utilisées avec ce type de modélisation et que des conséquences cliniques ont pu être démontrées pour les patients. Même si le nombre de cas reste limité et qu’il s’agit d’une étude monocentrique n’utilisant que des radiographies, la méthodologie de mesure et la standardisation de la méthodologie avec des groupes strictement identiques constitue indéniablement une force pour cette étude.
Cette étude contribue à apporter des solutions pour le problème de l’usure du couple de frottement dans l’arthroplastie de hanche, intervention de plus en plus pratiquée chez des patients actifs à longue espérance de vie.
PA Devane, JG Horne, A Ashmore, J Mutimer, W Kim, J Stanley Wellington hospital, Wellington, New Zealand
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