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ANTICOAGULATION PREVENTIVE PAR HBPM ET PREVENTION EVENEMENT THROMBOEMBOLIQUE SUR LE PATIENT COVID-19

La maladie thromboembolique veineuse, constitue une complication aiguë majeure des infections pulmonaires à SarS-Cov-2, y compris chez des patients sous anticoagulation préventive. (1)


Actuellement aucune étude n’a permis de démontrer qu’une augmentation de la dose d’anticoagulation préventive par héparine de bas poids moléculaire (HBPM) diminue le risque de survenue d’un événement thromboembolique dans le COVID-19.


L’essai INSPIRATION (2) mené uniquement chez des patients hospitalisés en réanimation pour un COVID-19, n’a pas réussi à démontrer une différence significative dans le bras HBPM à dose intermédiaire ajustée au poids versus dose standard, dans la survenue d’un événement thromboembolique. L’objectif principal de cette étude était donc d’évaluer l’efficacité d’une anticoagulation préventive par HBPM à dose intermédiaire, ajustée au poids, par rapport à une anticoagulation préventive par HBPM à dose standard, dans la survenue d’un événement thromboembolique chez des patient atteints de COVID-19, hospitalisés en unité conventionnelle ou en soins intensifs. Il s’agit d’un essai multicentrique randomisé, contrôlé, avec comité d’adjudication en aveugle dans 20 centres français, qui comparait l’efficacité d’une anticoagulation préventive par HBPM à dose standard versus une dose intermédiaire ajustée au poids dans la survenue d’un événement thromboembolique chez des patients hospitalisés en unité conventionnelle ou en soins intensifs pour un COVID-19. Les doses d’HBPM attribuées a chaque groupe sont détaillées dans la table 1.



Le traitement était administré pendant toute la durée de l’étude, puis laissée à l’appréciation de l’équipe soignante lors de la sortie d’hospitalisation. La dose était augmentée si nécessité d’un transfert de l’unité d’hospitalisation vers l’unité de soins intensifs, selon le schéma de dose suscité. Le critère de jugement principal était la survenue d’un événement thromboembolique ou d’un décès inexpliqué pendant l’hospitalisation, jusqu’au 28ème jour après randomisation. La survenue d’un saignement majeur ou mineur était bien évidemment évaluée dans chaque bras du traitement.


Entre le 13 mai 2020 et le 29 avril 2021, 1005 patients ont été inclus, 506 dans le bras expérimental et 499 dans le bras standard. Huit cent un patients (80,1%) étaient issus d’une unité conventionnelle et 199 (19,9%) des soins intensifs. La durée médiane d’hospitalisation était de 8 jours (5-13), et 99,6% des patients étaient traités par Enoxaparine (0,4% par Tinzaparine) pour une durée médiane de 7 jours. La dose médiane d’Enoxaparine était de 12 000 UI (Interdecile range : 10 000-14 000) dans le bras expérimental et 4000 UI (Interdecile range : 4000-8000). Le suivi moyen était de 64 (61-75) jours dans le bras contrôle et 65 (61-75) jours dans le bras expérimental. Il n’y avait pas de différence significative entre les 2 groupes concernant les traitements étiologiques et notamment pour la corticothérapie systémique et le Tocilizumab.


Dans le bras expérimental, on notait 1,2% d’évènements thromboemboliques versus 2,1% dans le bras contrôle HR 0,59 (95% CI : 0,22-1,65, p=0,31), avec une survenue plus précoce à 4 jours (2-14) dans le bras expérimental versus 13 jours (8-19) dans le bras contrôle. On ne notait aucune différence significative dans les sous populations suivantes : patients d’unité de soins intensifs, d’hospitalisation conventionnelle, avec indice de masse corporelle > 30 kg/m2. On ne notait pas de différence significative dans la survenue d’un saignement majeur dans le bras expérimental versus standard (1%versus 1,3%). En revanche, on notait la survenue d’un saignement non majeur mais cliniquement pertinent dans 4,9% des cas dans le bras expérimental versus 1,9% des cas dans le bras contrôle (p=0,011). Comme plusieurs études menées auparavant, surtout en soins intensifs (1-4), celle-­‐ci ne parvient pas non plus à démonter qu’une augmentation de l’anticoagulation préventive par HBPM, permet de réduire le risque de survenue d’une maladie thromboembolique en réanimation, comme en unité conventionnelle, dans l’indication d’un COVID-­‐19. Cet effet est observé dans toutes les sous populations étudiées, excepté les patients sous oxygène < 15L/min, mais cet effet relève très vraisemblablement de la multiplication des analyses statistiques dans les sous populations et ne peut être retenue comme cliniquement pertinente. Cette absence de résultats peut s’expliquer par une absence d’effet suffisant du traitement mais également par un manque de puissance de l’essai avec un taux réel d’évènements thromboemboliques plus faible que celui prévu lors du calcul préalable du risque de survenue et du nombre de sujets.


Par ailleurs, pour ce qui est des patients de réanimation, l’effet était d’autant plus difficile à démontrer puisque la dose d’anticoagulation dans le bras contrôle était déjà élevée (4000 UI x 2/j pour une clairance de la créatinine > 30 ml/min/m2), et la différence de dose moins importante entre les 2 groupes pour les petits poids (< 70 kg). En revanche, bien que le nombre d’évènements hémorragiques majeurs ne soit pas augmenté, on notait une augmentation dans le bras expérimental, du risque de saignement non majeur mais cliniquement pertinent. Ce dernier point avait déjà été noté dans plusieurs études préalables sur le COVID-19 en réanimation et avait tout de même conduit à des recommandations permettant de doubler les doses d’HBPM en réanimation dans cette indication, du fait de la baisse significative du taux d’évènements thromboemboliques, sans survenue de saignement majeur, seuls responsables d’une augmentation de la mortalité.



En conclusion, cette étude ne permet pas de conclure à une efficacité supérieure d’une anticoagulation préventive à dose intermédiaire adaptée au poids versus une anticoagulation préventive à dose standard chez les patients hospitalisés pour un COVID-19 en soins intensifs et en hospitalisation conventionnelle. On ne notait pas d’augmentation du risque de saignement majeur dans le bras anticoagulation préventive à dose intermédiaire.



Sophie DESMONS




Sources:

(1) Effect of weight-­‐adjusted intermediate-­‐dose versus fixed-­‐dose prophylactic anticoagulationwith low-­‐molecular-­‐weight heparin on venous thromboembolism among noncritically and critically ll patients with COVID-­‐19: the COVI-­‐DOSE trial, a multicenter, randomised, open-­‐label, phase 4 trial. Stéphane Zuily, Benjamin Lefèvre, Olivier Sanchez et al. Lancet Journal, 9 June 2023.


(2) Effect of Intermediate-­‐Dose vs Standard-­‐Dose Prophylactic Anticoagulation on Thrombotic Events, Extracorporeal Membrane Oxygenation Treatment, or Mortality Among Patients With COVID-­‐19 Admitted to the Intensive Care Unit. The INSPIRATION randomized clinical trial JAMA. 2021;325(16):1620-­‐1630.


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