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MIGRAINE AVEC AURA : UN FLASH SUR L'INFARCTUS !

L’athérosclérose vasculaire est loin d’être complètement élucidée. Au cours des dernières années, c’est l’inflammation vasculaire qui a fait l’objet de nombreuses études. Ceci nous rappelle tout simplement que la médecine interne n’est pas très éloignée de la cardiologie et que les maladies inflammatoires sont une source fréquente d’athérosclérose vasculaire. La migraine est une maladie peu connue des cardiologues. Cependant, c’est au cours des consultations que les patients posent, de manière incessante, des questions pertinentes sur le rapport entre les migraines et le risque cardiovasculaire.



La migraine est probablement une maladie très fréquente en population générale puisqu’on estime qu’un sixième de la population souffre de migraines. Dans environ un tiers des épisodes de migraines, il y a des signes neurologiques annonciateurs, le plus souvent visuels, et on parle alors de migraine avec aura. Cette migraine avec aura est souvent associée aux facteurs de risque classiques comme le tabac, l’hypercholestérolémie, le diabète, et la pression artérielle. Il est donc logique de se poser la question du rapport entre la présence d’une migraine avec aura et la survenue du risque cardiovasculaire qu’il s’agisse de l’infarctus du myocarde, de l’infarctus cérébral, ou de la mortalité cardiovasculaire. Dans une étude récente, les auteurs ont étudié l’impact de la migraine avec aura chez 39 876 femmes appartenant à la cohorte Women’s Health Study. Afin d’apporter des informations sur l’impact de la migraine avec aura sur le risque cardiovasculaire, les auteurs ont choisi d’ajouter cet élément prédicteur à des formules de risque classiques, telles que la formule de Reynolds et la formule de l’AHA, la « Pooled Cohort Equation ».

À partir des 39 876 femmes participant à la cohorte Women’s Health Study, les auteurs ont obtenu un échantillon final de 24 493 femmes disposant de l’ensemble des facteurs de risque et de l’ensemble des informations sur la migraine avec ou sans aura. Le suivi de la cohorte a été de 10,2 ans et les auteurs ont observé 569 événements cardiovasculaires, c’est-à-dire 45 événements chez les patientes ayant eu des migraines avec aura et 524 événements chez les femmes qui n’avaient pas de migraine avec aura.


Dans les modèles de prédiction multivariés, la migraine avec aura était associée à un risque relatif de 2,09 dans la formule de Reynolds et avec un risque relatif de 2,10 dans la formule de l’AHA ; ces deux risques relatifs sont très significatifs. Les auteurs ont essayé ensuite de savoir si la migraine avec aura apportait des informations significatives sur la prédiction du risque cardiovasculaire par rapport au modèle multivarié complet qu’il s’agit de la formule de Reynolds ou de la formule de l’AHA. Avec la formule de Reynolds, la discrimination est améliorée de 0,792 à 0,797 ; la discrimination relative est améliorée de manière significative alors que l’amélioration de la stratification selon le NRI n’est pas améliorée significativement. Avec la formule de l’AHA, la discrimination est améliorée de manière significative de 0,793 à 0,798 ; la discrimination relative est améliorée de manière significative alors que l’amélioration de la stratification selon le NRI n’est pas améliorée significativement. En d’autres termes, l’intégration de la migraine avec aura dans les modèles multivariés de prédiction cardiovasculaire améliore significativement la prédiction mais n’ajoute pas d’élément essentiel à la reclassification du risque. Ceci n’est pas étonnant dans la mesure où l’ensemble des facteurs de risque cardiovasculaire sont déjà dans le modèle et qu’il peut y avoir des associations significatives entre ces facteurs de risque traditionnels et la migraine avec aura.


L’intérêt de ce travail est double. D’une part, l’interrogatoire sur la migraine doit faire partie de l’anamnèse de tous les patients admis en cardiologie au même titre que l’interrogatoire sur les pathologies inflammatoires ou les pathologies psychiatriques. D’autre part, la migraine avec aura correspond à des phénomènes circulatoires et électriques complexes au niveau du cerveau et la même démarche doit être faite pour comprendre les aspects micro-circulatoires de la maladie coronaire athéroscléreuse. La compréhension des épisodes aigus cardiovasculaires doit donc passer par l’analyse des symptômes propres aux autres spécialités médicales.



Professeur Jean Ferrières – Fédération de cardiologie CHU de Toulouse



Référence: Rist PM, Buring JE, Cook NR, Kurth T. Contribution of Migraine to Cardiovascular Disease Risk Prediction. J Am Coll Cardiol. 2023 Jun 13;81(23):2246-2254.

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